Mysterieuse langue ummite
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Descripción
La mystérieuse langue «ummite»
Un étrange dialecte
Imaginons que nous recevions un message ainsi conçu:
OEMMII OIAGAA GAEOAO AIOOIAO OEMII UIAA OEMII EABAYO UAMM…
Pardon? Qu’est ce que c’est que ce charabia? Ça ne ressemble à aucune langue connue. Il y a beaucoup trop de voyelles (le contraire du polonais, quoi…).
Hé bien, ce serait de l'»ummite». Ce serait, parce qu’en fait, c’est une des seules phrases en «ummite», qu’on connaisse… si phrase il y a! Car on peut se demander si la langue «ummite» existe vraiment. Alors qu’on connaît des textes écrits en bâavien, on ne connaît vraiment de la langue «ummite» qu’une partie de son vocabulaire.
Ce vocabulaire émaille les lettres «ummites» comme des «lettrines» décorant un vieux parchemin. Ce qui donne ceci:
«Quand nous notons l’hypothèse du WAAMWAAM (PLURICOSMOS), c’est parce que nous observons que dans notre UNIVERS et dans le UWAMM (COSMOS complémentaire de charge électrique inverse), il y a un nombre très réduit de possibilités d’existence EAAIODI GOO (ONTOLOGIQUES).»
Mais est ce bien ainsi qu’on écrit à un correspondant étranger ?
Bien sûr, les «ummites» n’utilisant pas chez eux notre alphabet latin, ces mots bizarres ne sont qu’une transcription phonétique. Sur leur planète, ils auraient leur propre écriture. Pour rendre leur lettres plus «vraies» (enfin, plus exotiques), ils se laissent aller à écrire quelques mots dans la graphie de leur planète, graphie qui évoque plutôt une écriture orientale millénaire, que celle d’une civilisation très en avance sur la notre (un peu comme la pierre d’Alberto Sanmartin avait l’air de sortir d’un tombeau égyptien plutôt que d’une soucoupe)
caractères «ummites» |
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Les ummologues s’employèrent à recenser ces mots «ummites». Antonio Moya Cerpa, compila un dictionnaire de 403 mots en 1978, dans l’espoir qu’ils puissent servir à une analyse linguistique.
Ignacio Darnaude soumit ce dictionnaire à Don Antonio Vidal Lamiquiz, professeur de linguistique à l’université de Séville. Celui ci décida d’organiser une table ronde qui réunit une trentaine de personnes. Bien que l’échantillon paraissent important, les conclusions portèrent surtout sur ses carences. On manquait de phrases structurées, de la phonématique, des mots autres que substantifs, de la logique de la langue. Bref, la conclusion finale fut qu’on ne pouvait rien affirmer (1)
Tentatives de décryptement
Cependant, en examinant bien la morphologie du vocabulaire «ummite», il semble que, sous réserve des erreurs de transcription, il se construise tout bêtement par assemblage d’éléments simples. Ainsi:
OOYIA = astre chaud = étoile
OOYAA = astre froid = planète
GAA = carré
OOYAAGAA = planète du carré = la Terre
WOA = créateur = Dieu
OOYAAGAAWOA = Dieu de la Terre = Jésus-Christ
D’où en sens inverse nous déduisons:
OOY = astre
IA = chaud
AA = froid
Euréka! Nous commençons à déchiffrer la langue «ummite».
Peut on aller plus loin?
Oui, répond le pseudo Jean-Pollion, qui aurait analysé 1345 vocables «ummites» (2)
Derrière ce vocable évocateur se cache un scientifique français, résidant en Belgique, mais publiant en Suisse (c’est pour ça que c’est si long à paraître en France). Il prétend qu’on peut décortiquer le vocabulaire au niveau de la lettre, considérée comme représentation idéophonémique de l’unité linguistique élémentaire des «ummites»: le «soncept». Ainsi alors que nos plus petites unités sémantiques sont des syllabes, celles des «ummites» sont des lettres.
Eurêka! Jean Pollion vient de prouver que les «ummites» utilisent un type de langage inconnu sur terre. Les «ummites» sont donc de vrais extraterrestres!
Bien sûr, on peut se demander comment Jean-Pollion – qui n’est pas linguiste – sait que ce système est inconnu sur Terre. Il est simplement inconnu de lui
Bien sûr, les mauvaises langues feront remarquer que Jean-Pollion vient de réinventer l’eau chaude en retrouvant le principe de la kabbale hébraïque
Bien sûr, on peut remarquer, avec Jean-Michel Abrassart, que si on suit l’auteur dans son raisonnement, et sachant que W = information, O = être, et A = réel, on retrouve bien WOA (Dieu) = «information qui fait exister le réel «, mais aussi bien d’autres traductions.
En effet, selon le même auteur, on aurait aussi W= variation, changement, événement, nouveauté et modification. O = entité, créature, existence, réalité dimensionnelle et composant. A = vérité, réalité de fait, activation, action, validation, validation active, passage à l’acte, vérification expérimentale et effectivité. Soit au total 420 traductions possibles!
On aurait par exemple: «Changement d’un composant de la vérité», ce qui serait plus une définition de la religion que de Dieu
Mais il y a pire. La sémantique lettre à lettre est bel et bien une création humaine. Elle ne date d’ailleurs pas d’hier, puisqu’elle est apparu au XVIIème siècle dans le cadre de la recherche d’une langue universelle, ce Saint Graal que les hommes cherchent depuis la tour de Babel. Mais pour le savoir il faut être linguiste, et de préférence spécialiste des langues synthétiques, type solrésol, volapük ou espéranto. (on a recensé plus d’un milliers de langues synthétiques. En voulant unifier la langue, les humains n’ont fait que «babéliser» davantage)
Urchard le précurseur |
Un tel système a en effet été imaginé et publié en 1653 par l’écossais Thomas URCHARD, dans «Logopandecteision, or an Introduction to the Universal Language». Dans ce système, chacune des lettres d’un mot devait avoir un sens, de sorte qu’on pourrait les intervertir sans inconvénient. C’est le principe de la langue philosophique chère à LEIBNIZ
Mais URCHARD n’avait donné ni dictionnaire, ni grammaire. Il revenait à un autre écossais, George Dalgarno, de combler cette lacune pour créer une langue philosophique opératoire
Dalgarno utilisait un système de classification des idées (un peu comme Dewey plus tard, pour les bibliothèques) qu’il rangeait en 17 classes suprêmes qui se divisaient en sous-classes, par la variation de la seconde lettre. Quatre lettres dites «serviles» concouraient à la formation des mots sans avoir de sens déterminé
La langue de Dalgarno ne fut pas utilisée, car pour retrouver sans erreur le sens d’un mot, il fallait connaître par coeur toute la classification logique, c’est à dire en pratique tout le dictionnaire (3)
Il n’empêche que le principe de la signification lettre à lettre, était connu sur Terre depuis longtemps. Exit la preuve de «l’exogéisme» des «ummites»
Pardon, comment s’écrit «planète»?
Les analyses qui précèdent, supposaient qu’il n’y avait pas d’erreur de transcription. Bien sûr, nous contrôlons ce fait pour un mot souvent cité dans les lettres «ummites», le mot «planète», pour lequel on trouve aussi «astre froid», ou astre «solidifié» et même «planète froide»
Patatras, tout s’écroule, dans les seules lettres disponibles sur le Web, nous avons trouvé:
OIAA, OIIAA, OOIAA, OOYA, OOYAA, OYA, OYAA, OYIA, OYIAA…
…c’est à dire presque toutes les combinaisons possibles.
OYAYA! C’est la catastrophe. Vérifions pour le mot «étoile»:
OOYA, OOYIA
Mais c’est pas vrai! Non seulement on ne sait pas comment s’écrit vraiment «planète» (on dira que c’est la faute du dactylographe qui tapait les lettres «ummites») mais les «ummites» ne semblent pas distinguer une étoile d’une planète…
Mais d’où sortent ces extraterrestres de carnaval?
Du coup, puisque l’on ne sait plus comment s’écrivent vraiment les mots «ummites», il devient totalement illusoire de tenter une analyse sémantique lettre à lettre. Exit la géniale théorie du champollion du langage «ummite».
On sèche sur l’«ummite»
Mais on ne sait toujours pas s’il existe vraiment une langue «ummite». On peut déjà douter des prétendues phrases «ummites». Passe encore pour:
AYIIO-NOOXOE-OYAA-DOEE-USGIGIIAM
Qui se traduirait: «Cette planète verdâtre paraît flotter dans l’espace»
Mais on en lit qui ressemble à ceci:
OA DO DO IA KAAWAEA UMMO UMMO UMMO
explications des «ummites»:
OA : nous avons réalisé ce voyage (en deux lettres? fortiche…)
DO : et nous provenons de
IA KAAWAEA : pour étudier votre culture
UMMO : notre planète.
Donc nous traduirions:
«nous avons réalisé ce voyage, et nous provenons de, et nous provenons de pour étudier votre culture UMMO UMMO UMMO»
Hé bien non, il faut traduire:
«Nous avons réalisé ce voyage en provenance de UMMO pour étudier votre culture, et Nous pensons ne faire de mal à personne, tranquillisez-vous.»
Ah bon? Ben oui, la répétition d’un mot serait signifiante. Ils appellent ça le «bi-langage» (comme si ça n’existait pas sur Terre)
démonstration:
DO UMMO DO DO UMMO UMMO DO DO DO
«Nous venons de UMMO, et Nous sommes arrivés au dessus de la France avec notre nef.»
ça avec deux éléments sémantiques?! C’est comme du Morse, alors? (en Morse ça donnerait par exemple ETI7. Bien essayé ETI7, – fils de ETI5 – mais ça ne prend pas)
Bien sûr il existe des fantaisies dans chaque langue. Comme en français l’histoire des 3 sots (non seaux, oh et puis zut) ou une phrase commençant par «Si Sissi scie six..».
Le chinois, lui, réussit à faire une phrase avec 8 fois «Fu», car la signification est dans le rythme et l’intonation. Mais justement l’écriture est ici phonétique (et dictée «recto tono») donc l’extraction d’un autre sens est ici impossible
De plus, nous avons vu qu’en «ummite», le sens s’obtient à partir de syllabes très signifiantes (à ce détail près que nous n’en connaissons pas l’orthographe exacte). C’est tout à fait contradictoire avec ce procédé de répétition, tout juste bon (s’il était possible) à faire des jeux de mots. Allez messieurs les «ummites», faisons comme les chinois: DO DO DO DO DO DO DO DO , ça signifie quoi pour vous?
Donc, on est vraiment pas sur que les «ummites» puissent faire des vraies phrases avec leur supposé vocabulaire. On n’est pas rigoureusement certain (pour cause d’orthographe imprécise) que ce vocabulaire obéit à des règles morphologiques précises. On se demande d’où sort sa consonance étrange, qui certes, serait bien normale de la part d’extraterrestres.
Les nouvelles pistes
On peut remarquer avec Jacques Scornaux que les lettres les moins fréquentes en espagnol sont justement très fréquentes en «ummite». Avec l’exception du O, fréquent en «ummite» comme en espagnol (mais en finale seulement). C’est comme si on avait voulu fabriquer un vocabulaire qui présente l’exotisme maximum pour un lecteur espagnol, ou encore comme si le scripteur était un Espagnol qui ne veut pas en avoir l’air.
Un autre élément va dans ce sens: les lettres «ummites» en français contiennent des hispanismes. Ainsi, au lieu d’écrire » l’importance «, les «ummites» écrivent » la transcendance «, parce qu’en espagnol «importance» se dit «trascendencia «. De même, ils écrivent «le brillant » au lieu de «l’éclat » ( «brillo» en espagnol) et écrivent «sistème» pour «système» («sistema» en espagnol) .
Pour Bertrand Meheust , la linguistique d’Ummo semble inspirée du roman de SF de Ian Watson «l’enchâssement»
L’enchâssement est un procédé consistant à insérer des parenthèses dans des parenthèses au point de perdre le fil du discours. Dans le roman de Ian Watson, une tribu transforme, sous l’effet d’une drogue, son langage courant, le xemahoa A, en un langage enchâssé, le xemahoa B, dans lequel se transmettent ses mythes. Son étude intéresse des extraterrestres qui cherchent à élaborer une grammaire universelle à partir de différents langages pour découvrir une transcendance permettant d’accéder à l’Autre-Réalité.
Les «ummites» ont ils lu «l’enchâssement»? En tous cas le vocabulaire «ummite» paraît avoir une double fonction: d’abord désorienter cognitivement la victime (procédé employé par toutes les sectes qui connaissent leur métier). Ensuite relever d’un goût très exotique une littérature trop médiocre. Exactement comme pour les romans d’anticipation à la petite semaine. Prenez un banal roman d’espionnage. remplacez le Nicaragua par la planète Zarkon, les fonctionnaires corrompus par les prêtres d’Usschar et les agents du KGB, par des androïdes contrôlés par les gardiens de l’ordre de Xilith, vous obtenez un roman de space opéra.
Et nous ne savons toujours pas ou les «ummites» on trouvé leur inspiration pour fabriquer ces syllabes survoyellées si caractéristiques. Certains ont pensé à des consonances africaines. C’est vrai que «UMMOAELEWE» ça fait africain. Mais XANMOO XOGUU, c’est moins évident.
Godelieve Van Overmeire, qui aurait passé 10 ans au Congo écarte la piste africaine. Mais elle en a trouvé une autre dans un dictionnaire Anglais – Chinois (mandarin). Beaucoup de mots «ummites» auraient une correspondance en chinois.
Dans cette hypothèse, l’auteur des lettres «ummites», qui ne sont pas écrites par des extraterrestres, ça c’est sûr, serait un espagnol qui se serait fabriqué un petit dictionnaire «ummite» à l’usage des gogos, en s’inspirant d’un dictionnaire de chinois, pour faire plus exotique
…Et la encore, il n’aurait fait que copier sur le «Baal contrat» qui trouvait également son inspiration en Chine